Échouer est un tabou en France alors qu’outre-mer, chez nos voisins américains, il est mis en valeur. Pourquoi donc pointons-nous du doigt l’échec dans notre société ? L’échec est pourtant une véritable école de la vie et peut être un levier puissant d’évolution lorsque l’on sait adopter un mode de pensée qui vise l’apprentissage de l’expérience. Je vous propose d’approfondir ensemble cette thématique essentielle dans l’entrepreneuriat et de comprendre l’importance de développer cette culture à notre avantage.
Accepter d'échouer : le processus
Vous avez tenté quelque chose, et vous avez échoué. Pourquoi la pilule est-elle si dure à avaler ? Très souvent, lorsque nous faisons des essais, lorsque nous nous exposons et que les résultats espérés ne sont pas au rendez-vous, nous avons tendance à automatiquement remettre en cause notre propre valeur. Nous touchons ainsi à notre estime et à l’image que nous avons de nous-même. Ce processus quasi-automatique et inconscient ne nous autorise pas l’imperfection. Essayons de comprendre les racines de cette réaction face à l’échec.
Nos voisins américains ont un modèle opposé aux nôtres. Là où ils vont prôner et mettre en avant cette culture de l’échec, nous français, allons le faire rimer avec négativité et défaite. Nous sommes réactif plutôt que proactif face à l’échec. C’est une bête noire à éviter.
Cela peut s’expliquer en partie par notre système d’éducation dans lequel sont valorisés ceux et celles qui suivent bien les consignes à la lettre et ne s’écartent pas du parcours initial. L’erreur est mal perçue. Cela se poursuit plus tard dans le salariat, si les résultats ne sont pas là, c’est forcément que la personne en question n’a pas suffisamment travaillé ou pas correctement, n’a pas suivi le protocole, on pointe alors du doigt et on trouve un coupable. Un sentiment de honte peut venir accompagner l’échec car on rend responsable une personne en particulier derrière un projet.
Outre-Atlantique, échouer est source d’apprentissage et contribue à nous faire avancer vers la bonne direction. On retrouve aussi cet état d’esprit en Europe dans les pays scandinaves et au Royaume-Uni. Pour ces pays, celui qui n’échoue pas, c’est surtout celui qui ne tente rien et qui n’a donc pas l’audace de s’exposer au risque d’échouer ou de réussir. On met en lumière le processus plutôt que le résultat et on s’inspire des expériences pour transmettre des clés et des conseils utiles au collectif. Un parcours sans échec peut même être jugé inintéressant et synonyme de manque d’expériences et de connaissances.
Ceux et celles qui échouent et rebondissent sont les personnes qui sauront s’adapter plus facilement au changement et davantage orienté soluti
Échouer, une étape essentielle ?
Il y a ceux qui font, et il y a ceux qui parlent. Ceux qui font n’ont pas peur de l’imperfection ou tout du moins en font fi. Ceux qui parlent sont souvent ceux qui vont critiquer les faiseurs, les doers. Il n’y a que ceux qui n’osent rien tenter qui ne se tromperont jamais. Échouer a cette connotation négative car nous avons tendance à l’opposer à la réussite alors qu’ils sont complémentaires.
Nous vivons dans un monde de polarité. Les opposés ont besoin l’un de l’autre, sans quoi nous ne pourrions les expérimenter. En d’autres termes, nous ne pourrions savourer la réussite sans connaître l’échec. Comment savoir ce qu’est la réussite si son opposé n’existe pas ? Se prémunir de l’échec, c’est donc aussi se priver de la réussite. Nous ne serions sans doute pas capable de reconnaître nos réussites si nous n’acceptions pas d’échouer.
Très souvent, nous avons développé des croyances liées à l’échec, qui ne nous appartiennent pas toujours. La plupart d’entre elles peuvent avoir été transmises au cours de notre développement, à travers nos proches ou nos enseignants. « Il faut avoir de bonnes notes », « il faut faire des études pour réussir dans la vie », des injonctions sociétales, familiales, qui nous conditionnent à suivre une voie toute tracée, à ne pas déborder, sinon nous avons « raté » notre vie. C’est souvent inconscient, mais c’est là, et ça impacte sournoisement nos choix, nos comportements, nos pensées et notre valeur. Par conséquent, échouer n’est pas une option.
Hors, échouer est une étape nécessaire pour progresser. Il suffit de regarder l’historique de célébrités qui ont essuyé de nombreux refus, de nombreux échecs, sans pour autant abandonner :
- Oprah Winfrey s’est faite virée de son premier job à la TV car jugée « inapte pour la télévision ». Elle est aujourd’hui l’une des femmes les plus riches de l’industrie du divertissement et est devenue millionnaire à 32 ans
- J.K.Rowling, l’auteure de la saga Harry Potter, était une jeune mère divorcée vivant d’allocations lorsqu’elle se plonge dans l’écriture de ses futurs best-sellers. Elle tombe même dans la dépression mais s’accroche. Elle fait face aux refus de plusieurs maisons d’édition (qui doivent s’en mordre les doigts aujourd’hui) avant qu’un agent littéraire l’aide à publier son oeuvre magique. Elle est aujourd’hui milliardaire.
- Stephen King s’est vu refusé son premier roman Carrie 30 fois par les maisons d’édition. Dépité, il finit par jeter son manuscrit. Son épouse le récupère et le pousse à ne pas abandonner. Il le propose une dernière fois, et ce fut la bonne.
- Walt Disney était passionné de dessins depuis petit, son père n’approuvait pas sa passion et il prit alors des cours en secret. Plus tard, il se fait renvoyer par le rédacteur en chef d’un journal pour lequel il travaille, par « manque d’imagination et de bonnes idées ». Il ne s’avoue pas vaincu et lance son entreprise, qui essuie de nombreux essais peu fructueux. On sait aujourd’hui l’empire que représente Walt Disney…
- Michael Jordan se fait virer de son équipe de basketball du lycée. Il accumule les échecs et le dit lui-même : « « J’ai raté plus de 9000 tirs dans ma carrière. J’ai perdu près de 300 matchs. 26 fois, on m’a fait confiance pour prendre le tir de la victoire et j’ai raté. J’ai échoué encore et encore et encore dans ma vie. Et c’est pourquoi je réussis. ».
Des exemples comme ça, de personnes connues et moins connues, il y en a à la pelle à qui sait regarder au bon endroit.
Le seul échec serait de ne pas le considérer comme une véritable source d’apprentissage. Comme le disait Einstein : « La folie c’est de faire toujours la même chose et de s’attendre à un résultat différent ». Cependant, un échec perçu comme une leçon permet de changer sa façon d’appréhender le dit problème.
J'ai échoué : quelles leçons en tirer ?
C’est un travail sur soi personnel d’apprendre à tirer des leçons de ses échecs afin de ne pas répéter sans cesse les mêmes cycles, les mêmes schémas, et les mêmes erreurs. Voici quelques pistes :
- Muscler votre optimisme : ça se cultive au quotidien et ça commence par comprendre comment notre cerveau fonctionne. Nous avons des biais cognitifs dont le biais de négativité, et nous allons avoir tendance naturellement à focaliser sur le côté négatif d’une expérience. Il peut être difficile de voir le bon côté des choses, notre ego en prend un coup. Mais l’optimisme n’est pas un trait de caractère, c’est un choix. J’ai le choix d’aborder le problème différemment, de pivoter mon angle de vue et de chercher des solutions alternatives. Personnellement, me former à la psychologie positive, pratiquer la méditation et cultiver la gratitude chaque jour pour tout ce que j’ai, m’ont permis de devenir optimiste à toute épreuve alors qu’auparavant je préférais choisir d’être pessimiste pour toujours m’attendre au pire… Mais nous sommes ce que nous pensons donc on attire ce qui a notre attention. On peut tous changer si on le décide.
- Prendre du recul : ce que j’entends ici, c’est prendre le temps de se détacher de la charge émotionnelle liée à l’échec. Nous sommes des êtres émotionnels. Que l’on choisisse ou non de les traverser pleinement et d’en faire nos meilleurs alliées, elles font partie de nous. Ne pas prendre ce temps nécessaire à revenir à un état émotionnel neutre, à prendre de la hauteur et à observer l’expérience, c’est sauter tête baissée à nouveau dans le même processus et donc potentiellement, obtenir le même résultat. Souvenez-vous de la citation d’Einstein plus haut.
- Admettre ses erreurs : l’erreur est humaine et votre vulnérabilité n’est pas une faiblesse, elle est tout son contraire. Il est important de savoir prendre sa responsabilité au bon endroit et de se remettre en question si nécessaire pour progresser. Cela demande de solliciter davantage le muscle de l’humilité que de l’ego. Car l’ego, lorsqu’il n’est pas maîtrisé et que nous en sommes donc l’esclave, absorbe toutes nos peurs et nous avançons sous leur commandement. Il est important de rester l’acteur principal de sa vie, en développant sa pleine conscience et en évitant de subir notre pilotage automatique. Ne vous positionnez pas en victime, soyez proactif.
- Analyser les causes de l’échec : prendre le problème et le regarder bien en face pour analyser précisément les causes du résultat insatisfaisant. Il n’y a qu’en mettant en lumière ce qui peut expliquer l’échec que nous nous donnons le pouvoir d’agir dessus. Nous ne pouvons pas changer ce qui n’est pas à notre connaissance. Prenez votre courage à deux mains, remballez votre fierté un instant, et soyez le plus objectif possible.
- Cultiver la foi en vos rêves : restez focus sur vos objectifs mais n’ayez pas peur de mettre de la flexibilité et de l’ouverture d’esprit si vous ne prenez pas la bonne direction, comme on dit, il n’y a que les cons qui ne changent pas d’avis ! N’hésitez pas non plus à vous exposer au feedback des autres, sélectionnez les bonnes personnes c’est important, et prenez en considération la critique constructive. Ceux qui ont réussit ne se sont pas faits du jour au lendemain et ne sont pas non plus arrivez à leur sommet tout seul.
"L'échec est seulement l'opportunité de recommencer d'une façon plus intelligente"
- Henry Ford
La gestion émotionnelle de l'échec
D’instinct, échouer est associé à des émotions dites plutôt négatives. Toutes les émotions sans exception nous sont utiles et agissent comme un véritable GPS intérieur. Mais, on en passe surtout par le côté désagréable ici : frustration, colère, tristesse, déception, découragement, honte… En soi, une émotion est une réaction physiologique qui ne dure qu’un court instant. Si nous restons sous le contrôle de cette émotion pendant des heures, des jours, des semaines, des mois, voire des années, c’est parce que nous alimentons cette émotion avec nos pensées. Il va donc être important d’observer en conscience notre dialogue interne pour tenter de cultiver des pensées plus aidantes et positives. Tout en acceptant aussi de vivre et de traverser nos émotions qui sont tout à fait légitimes, sans les juger.
Mon réflexe quand je suis dans l’émotionnel, de manière générale, c’est d’accepter cette émotion. Et de venir ensuite écouter son message. Pourquoi la colère émerge ? Qu’est-ce que cela signifie ? Qu’est-ce qui est touché en moi pour me mettre ainsi en colère ? Et petit à petit, en observant et en analysant, on met le doigt sur de précieux enseignements de soi-même à soi-même. C’est une forme d’auto-coaching qui requiert un travail d’observation bienveillant avec soi. Il est important de comprendre l’élément déclencheur de l’émotion. Ok je vis un échec, mais qu’est-ce qui me fait réagir ? Ai-je peur de ce que vont penser les autres ? Est-ce que je suis en train de me juger sévèrement ? Est-ce que ce phénomène vient renforcer des croyances limitantes ou confirmer des critiques que l’on aurait pu me faire ? Observez et trouvez le déclencheur.
La pratique d’activité de pleine conscience, de façon répétée et sur le long terme pour en tirer tous les bénéfices aident grandement à développer une meilleure intelligence et gestion émotionnelle. Il est possible de se faire accompagner aussi.
"Je me suis entraîné 4 ans pour courir seulement 9 secondes... Il y a des gens qui n'obtiennent pas de résultats après 2 mois et qui abandonnent."
- Usain Bolt
Vous l’aurez compris avec cet article, échouer est avant tout un apprentissage nouveau à adopter pour se libérer de nos conditionnements en place. Oeuvrons pour un monde plus authentique, où les parcours les plus imparfaits des uns et des autres sont mis en valeur plutôt que les résultats. On a tendance, à tort, à se comparer sans cesse aux autres, et ce phénomène s’est amplifié avec l’essor des réseaux sociaux. La performance c’est admirable mais le processus qui y mène est d’autant plus inspirant. Un discours que je trouve incroyable et qui prouve que tout a une raison sur notre chemin vers la réussite, c’est celui de Steve Jobs à Standford que tu peux regarder ici (sous-titres en français). Heureusement, les moeurs sont en train de bouger peu à peu chez nous aussi, ça reste lent, mais ça progresse dans le bon sens.